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22/02/2005

La péréquation des produits pétroliers:problématique et alternatives

La Caisse de Compensation constitue depuis des décennies, un passage incont-ournable pour tous les opérateurs du secteur des hydrocarbures. On ne peut parler des produits pétroliers au Maroc, sans évoquer le rôle que cet organisme avait joué et continue à jouer actuellement. Il régule les prix à la sortie de la raffinerie ou à l’importation et permet de les stabiliser au niveau de la distribution. Créée en 1941 pour gérer les péréquations des produits importés tels que le bois, le sucre et les produits pétroliers, la Caisse de Compensation représente l’un des derniers vestiges de la colonisation dont le Maroc n’a pu se débarrasser . Vraisemblablement, le législateur n’avait pas pensé imposer une date limite de sa mission.
La péréquation des produits pétroliers commence à avoir de l’importance et devient systématique dès le début des années 50. Elle a été instituée pour parer à des problèmes économiques conjoncturels qui pouvaient se poser. Après 50 ans d’indépendance, elle devient et reste une nécessité structurelle. En effet, dès 1953 la guerre de la Corée avait entraîné une pénurie de pétrole brut dans le monde, qui s’est traduite par une flambée de prix des produits pétroliers raffinés que l’économie marocaine ne pouvait supporter. Les textes réglementaires élaborés à cet effet permettaient de réguler les prix sur le marché national pour amortir, un tant soit peu, le choc des fluctuations du marché international. Les prix de cession aux sociétés de distribution étaient fixés mensuellement par l’Etat en fonction des prix affichés par les multinationales, pour pouvoir ajuster les prix de vente au public chaque fin de mois. Après la guerre de la Corée, les prix se sont stabilisés et la péréquation a continué à générer un excédent qui permettait d’assurer un équilibre entre les ressources et les emplois de sorte que l’excédent issu des moments favorables soit utilisé pour éviter toute répercussion directe d’une éventuelle augmentation brutale des prix, sur le consommateur .
La période entre 1960 et 1970 a connu une stabilité relative jonchée par de petites augmentations de prix décidées par l’OPEP créée en 1960. Ce fut également la période durant laquelle, cette organisation avait commencé à négocier avec les multinationales, les prix et les niveaux de production du brut. Parallèlement, on assistait à des nationalisations du secteur des hydrocarbures, suite à la prise de conscience progressive des pays producteurs de pétrole. Au même moment au Maroc, pour subvenir aux besoins du marché, une deuxième raffinerie a été construite à Mohammedia dont l’extension a été réalisée en 1968 pour passer d’une capacité de production de 4 à 7 millions de tonnes. On avait donc deux raffineries, deux coûts de raffinage différents et deux structures de prix. La Caisse gérait bon an mal an cette situation, et continuait à dégager un excédent sur la péréquation des produits pétroliers, qu’elle utilisait pour subventionner d’autres produits de base tels que la farine, le sucre , le lait et le ciment .
Le premier choc pétrolier consécutif à la guerre d’octobre 1973, entraîna une hausse du prix du brut qui passa de 3 à 11,5 $ US le baril. Cet événement changea complètement la donne. En effet, pour la première fois depuis sa création, la caisse de compensation va devenir déficitaire, exception faite de quelques brèves embellies, et le restera jusqu’à nos jours. Car depuis ce choc les prix du pétrole brut ne connaîtront que des augmentations. Les diminutions de prix opérées restaient insignifiantes. A partir de 1973 un système qui permettait d’avoir des prix de reprise stables et déterminés en fonction du coût prévisionnel du raffinage, a été instauré. Les raffineries travaillaient en régie. L’Etat leur garantissait alors une rémunération nette d’impôts de 10% de leur capital social. L’intervention de la Caisse de Compensation s’effectuait à deux niveaux : pour les sociétés de distribution, la régularisation est mensuelle et calculée sur la base de la quantité mise à la consommation reconnue par les services des douanes, pour les raffineries, le contrôle s’effectue annuellement et à posteriori, par l’examen et l’étude par une commission interministérielle des prix, d’un dossier élaboré sur la base des charges réelles d’exploitation de la raffinerie. Le deuxième choc pétrolier de 1980 n’a pas arrangé les choses, bien au contraire. Le prix des cargaisons"spot" dépasse la barre des 20$ US le baril alors que le prix officiel fixé par l’OPEP était de 13,3$US le baril.
Depuis le 1er janvier 1995, et dans un souci de préparer le secteur des hydrocarbures à la privatisation, le système de régie fut abandonné et remplacé par"la formule d’indexation". On est pratiquement revenu au système d’avant 1973 : les prix de reprise sont indexés sur le marché international des produits raffinés et changent tous les mois. La répercussion d’une augmentation du prix de reprise sur le consommateur se fait par décision du gouvernement. En adoptant ce système, le raffinage du pétrole brut a cessé de faire partie du sérail de la Caisse de Compensation : un "coefficient d’adéquation "qui lui a été accordé dans la structure des prix lui permet d’avoir un prélèvement à la source et assurer une sorte de compensation interne. Le problème du raffineur a été réglé au détriment des distributeurs. Ces derniers resteront malgré la privatisation, tributaires de la péréquation. Cette dernière permet de régénérer une somme de 1milliard de DH alors que le butane à lui seul, continue à avoir un déficit chronique à hauteur de 2,4 milliards de DH . Ce système actuel crée un déséquilibre entre les ressources et l’emploi et pénalise les sociétés gazières en favorisant, sur le plan trésorerie les sociétés qui font moins de gaz et plus de carburants.
Aujourd’hui, la problématique de la libéralisation reste entière. Même en libéralisant une partie des importations, la fixation des prix et des marges en amont et en aval ne permet pas d’inciter les opérateurs à faire davantage d’importations et à mieux négocier leurs contrats d’achat. On devrait élaborer un modèle qui permettra de transmettre tout au long de la chaîne, depuis le raffinage en passant par les importations, jusqu’à la distribution, les signaux du marché international et partant la vérité des coûts et des prix. D’ailleurs, les opérations de la caisse de compensation des produits pétroliers sont devenus quasiment mécaniques et ne jouent plus le rôle de péréquation proprement dite. La politique de la subvention est devenue incompatible avec la libéralisation et l’encouragement de la concurrence. Cette libéralisation est aussi dictée par les nouvelles règles de l’économie mondiale qui abolissent le protectionnisme et limitent l’intervention des États dans l’imposition des prix pour éviter justement la dépendance du budget de l’Etat d’une recette aléatoire comme c’est le cas actuellement au Maroc. Actuellement, on a l’impression que la péréquation des produits pétroliers gérée par la Caisse de Compensation est une nécessité fatale. Dans ce sens qu’on s’ingénie à la maintenir vaille que vaille. On dépense plus de réflexions, plus de temps à inventer des subterfuges, des artifices, des feintes et des solutions échappatoires, qu’à la supprimer et à adopter un autre système qui répond aux exigences de la libéralisation. Viendrait un jour où toutes les solutions de ce genre seront épuisées. Les conservateurs obsédés uniquement par la volonté de protéger prébendes et rentes, doivent changer leur comportement et se rendre à l’évidence qu’on ne fait que léguer le problème aux générations futures. Nul ne peut prétendre désormais qu’il existe un autre système que la loi du marché avec ses contraintes et hélas ! ses injustices. Il s’agit d’inventer des "freins" face à ce mouvement naturel qui fabrique inlassablement inégalité et privilèges. D’aucuns diront que même les Etats industriels connus par leur libéralisme, subventionnent quelques secteurs de leur économie. En effet, ces Etats subventionnent peut-être quelques branches de leur agriculture ou de leur industrie, mais jamais les produits pétroliers qui représentent une énergie indispensable pour toute l’activité économique. Et subventionner l’Energie revient à subventionner toute l’économie nationale.
Avec l’entrée en vigueur de la loi sur la concurrence et la libéralisation des prix, les produits pétroliers ayant bénéficié d’une certaine protection, dans le passé, devront être commercialisés sans compter sur l’intervention de l’État dont le rôle devrait se limiter, désormais, à combattre le monopole des produits pétroliers pour permettre la diversification des sources d’approvisionnement et élaborer des textes de régulation pour éviter toute concurrence déloyale dans ce secteur vital.

Omar Elfetouaki

08:05 Publié dans énergie | Lien permanent | Commentaires (2)

Commentaires

je suis professeur universitaire tunisien,j'aimerais dans la mesure du possibe avoir plus de precision sur le mecanisme actuel de fonctionnement de la tarification des produits petroliers au Maroc.qules sont les^produits libres à l'importation et comment est fixé le prix de vente au consommateur marocain. d'amples information sur le systeme de tarification au Maroc m'aidera certainement dans mes travux de recherche.
je vous serais reconnaisant.
fethi nouri
ecole superieure de commerce de Tunis
campus universitaire de la Manouba
Tunis Tunisie

Écrit par : nouri fethi | 14/03/2005

je vous remercie monsieur NOURI FETHI de l'intérêt que vous avez eu à l'égard de mon écrit. Seulement vous ne m'avez pas laissé votre E-MAIL pour que je puisse vous répondre. Alors j'attends votre adresse électronique
Omar Elfetouaki

Écrit par : elfetouaki | 14/03/2005

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