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24/03/2005

Départs volontaires et restructuration au Ministère de l'Energie et des Mines

« Le comportement rituel a quelque chose d’inhumain, dans la mesure où il contrarie l’intelligence »
René Maury

Le 07 février 2005, date de la publication au bulletin officiel du décret fixant les attributions et l’organisation du Ministère de l’Energie et des Mines, sera gravé à jamais dans la mémoire de ce Département. La structure qui fût composée de trois Directions Energie, Mines et Géologie est révolue. Elle aurait servi un quart de siècle. L’ancien ministère avec sa vieille structure est institutionnellement mort un nouveau ministère est né. Il faut dire que l’ancienne structure était devenue impotente et vieillotte et il fallait donc la redynamiser et la rajeunir. Le nouvel organigramme compte désormais pas moins de six Directions Centrales et 16 Directions Régionales. Une structure énorme à la hauteur de l’importance économique des secteurs énergétique et minier à laquelle, malheureusement, la vision et la stratégie de la mission du Département semblent faire encore défaut.
Juste après l’approbation du décret par le Conseil des Ministres, un appel à candidature a été organisé par la Direction des Ressources Humaines du Département. Les cadres ont répondu massivement et avec fougue et enthousiasme à cet appel. Dans la foulée, une commission a été créée pour étudier les bulletins dûment remplis par les cadres et faire des propositions au Ministre. Evidemment, cette commission est composée des responsables de l’ancienne structure. Il aurait été judicieux de désigner juste après la publication du décret, les futurs Directeurs du nouvel organigramme qui à leur tour auraient fait des propositions des futurs chefs de division ; lesquels chefs de division auraient proposé les futurs chefs de services, pour pouvoir en fin de compte aboutir, au niveau de chaque direction, à une équipe homogène. Pour l’ensemble des cadres tout laisse à croire que les postulants aux postes de responsabilité auront l’embarras du choix. Quoiqu’il en soit, c’est un organigramme qui paraît représenter une grande opportunité. Cependant, et avec le temps qui passe, les cadres durent déchanter en apprenant que le nombre de place est finalement limité et l’octroi d’une responsabilité n’est plus tellement évident. Même ceux qui étaient responsables dans l’ancienne structure risquent de ne plus l’être dans la nouvelle.
La mise en place du nouvel organigramme est accompagnée d’une manière concomitante de l’opération nationale des départs volontaires lancée par le gouvernement, le premier janvier 2005. De prime abord, personne n’avoue vraiment être concerné par la nouvelle. "C‘est une opération qui concerne les autres, moi je serai responsable " "je serai certainement reconduit par le Ministre, j’ai mon expérience et ils ne peuvent pas se passer de moi" pensent à tort ou à raison la majorité des cadres. Avec l’approche fatidique du 30 juin 2005 et les nouvelles nominations qui tardent toujours à venir, les cadres commencent à s’essouffler et à faire leurs calculs et opter pour la prime du départ volontaire. Curieusement, un haut fonctionnaire qui se prend pour le maître bien-pensant irremplaçable du Département a déploré que cette prime ne soit pas attribuée sur la base des services rendus par l’intéressé à l’administration!! D’aucuns diront que cette cagnotte représente justement la prime de responsabilité cumulée pour les cadres qu’on avait empêché arbitrairement d’être responsables. Enfin, que cela soit un départ volontaire, un départ obligé ou un départ avantageux, cela veut dire exactement la même chose. Et chacun arrivera certainement, dans son for intérieur, à justifier le sien.
Le personnel du Ministère de l’Energie et des Mines vit actuellement au rythme de ces deux évènements : l’opération départ volontaire et la mise en place de la nouvelle structure. Faut-il partir ou attendre un poste de responsabilité ? C’est le sujet de discussion privilégié dans les bureaux, les couloirs ou autour d’une théière à la cafétéria du ministère. On ne travaille plus. Toute la réflexion des cadres est concentrée sur leur avenir : partir en retraite ou attendre une éventuelle responsabilité. Tout ce branle-bas perdure. Les nouveaux départs sont scrupuleusement suivis par les responsables, vraisemblablement, pour éviter de nommer parmi les futurs responsables les cadres optant pour le départ volontaire. D’aucuns diront qu’il n’est pas évident que cette opération soit une bonne chose pour un Ministère technique, le départ de compétences risque de poser un problème au niveau de la mémoire de ce Département hautement stratégique. C’est l’exemple de la Direction des Mines où on assiste à un départ collectif et non plus à un départ volontaire. Au contraire, dirait le sage, l’opération servira dorénavant de leçon aux générations futures pour leur éviter de considérer le travail à l’Administration Publique comme une fin en soi.
Quant au conclave auquel a été dévolu la responsabilité de faire des propositions au Ministre, il se réunit sans relâche pour arrêter la liste des responsables, en suivant un rituel précis où tout se déroule à huis clos et les supputations vont bon train. La rumeur bas son plein. Les"cardinaux"laissent passer quelques nouvelles suivant leur réseau d’information : Le nouvel organigramme vise paraît-il en premier lieu le renforcement du régional , la promotion de la femme en constituerait une grande partie et la promotion des jeunes cadres serait de mise. On apprend par ce biais que le sort de quelques Directions Régionales est connu en avançant même les noms des heureux élus. Après ces informations un grand nombre de cadres commence à comprendre que le départ volontaire est tout compte fait une solution de salut. On annonce le départ prématuré d’un Directeur qui a craqué en ne voyant rien venir. On assiste à une grande mise en scène extraordinaire dont l’orchestration est impeccablement menée par les responsables et leur réseau d’information.
Certes, dans une organisation où le non-management est déjà longtemps de rigueur , il est toujours difficile d’instaurer une organisation basée, un tant soi peu, sur les principes du management moderne. Car le rôle d’un manager n’est pas de connaître par cœur la consommation nationale en butane ou la demande électrique ou la part des énergies renouvelables dans la situation énergétique nationale, ni les statistiques minières etc. Son vrai rôle est de créer les conditions pour que les fonctionnaires de l’Etat trouvent du plaisir à travailler et par conséquent à participer à la production de la richesse au niveau national.
Pour l’heure, on attend d’un jour à l’autre l’annonce des heureux élus du nouvel organigramme. Vraisemblablement le conclave, conscient de sa grande responsabilité, est dans l’embarras. En tout cas, la fameuse fumée blanche de la cheminée de la "Chapelle Sixtine" tarde à monter.

Omar Elfetouaki